👉De la formation terrain à l'AFEST.
- s.lathiere
- 27 juil. 2019
- 6 min de lecture

📌Qu’est-ce que la nouvelle modalité AFEST ?
L’action de formation, définie comme « un parcours pédagogique permettant d’atteindre un objectif professionnel », peut désormais, du fait de la loi « Avenir professionnel » être réalisée en situation de travail. (Art L6313-2).
Vous me direz que la formation sur le terrain existe depuis longtemps en entreprise. Certes.
Ce qui change essentiellement ce sont les 3 points suivants :
- La reconnaissance en tant qu’action de formation de l’action de formation en situation de travail (AFEST).
Cela permet à l’entreprise de la prendre désormais en compte dans le bilan professionnel qui a lieu tous les 6 ans (sauf accord d’entreprise ou de branche validant une périodicité différente). Ce n’était pas possible auparavant pour les « formations terrain » ne faisant pas l’objet d’une certification (CQP par exemple).
- Un cadre se voulant garant d’une certaine efficacité et qualité :
la réalisation d’une AFEST doit respecter des modalités d’exécution décrites dans le décret n° 2018-1341 du 28 décembre 2018 afin de favoriser l’atteinte des objectifs de la formation. Il ne s’agit pas juste d’une simple mise en situation mais d’une réelle action de formation qui nécessite une ingénierie de formation avec une analyse préalable des métiers et des tâches, des objectifs de formation, un suivi du parcours d’apprentissage ponctué de phases réflexives et une connaissance -et reconnaissance- des compétences des tuteurs.
- Une vraie « professionnalisation » de l’accompagnement des tuteurs :
ils doivent connaître l’activité et les tâches à accomplir, participer à l’organisation de situations permettant d’atteindre les objectifs de la formation, savoir transmettre l’envie et les connaissances, savoir accompagner l’apprenant lors de séquences réflexives sur son activité (en alternance avec les séquences productives), savoir amener l’apprenant à gérer les « imprévus » propres à une mise en situation réelle et savoir évaluer objectivement les acquis. Notons que l’entreprise n’ayant pas en interne les ressources pour assurer un tel accompagnement (en potentiel ou en disponibilité) peut recourir à l’expertise d’un organisme de formation.
📌Concevoir et déployer une AFEST
L’AFEST doit être en phase avec l’article D. 6313-3-2 du décret n° 2018-1341 du 28 décembre 2018 : « La mise en œuvre d'une action de formation en situation de travail comprend :
1° L'analyse de l'activité de travail pour, le cas échéant, l'adapter à des fins pédagogiques ;
2° La désignation préalable d'un formateur pouvant exercer une fonction tutorale ;
3° La mise en place de phases réflexives, distinctes des mises en situation de travail et destinées à utiliser à des fins pédagogiques les enseignements tirés de la situation de travail, qui permettent d'observer et d'analyser les écarts entre les attendus, les réalisations et les acquis de chaque mise en situation afin de consolider et d'expliciter les apprentissages ;
4° Des évaluations spécifiques des acquis de la formation qui jalonnent ou concluent l'action».
La réalisation d’une AFEST ne s'improvise pas, elle nécessite :
* un travail préparatoire en amont, afin d’identifier :
- les situations existantes : la réalité de l’activité et les différentes tâches à maîtriser, les éventuels problèmes à résoudre, …mais aussi le positionnement initial de l’apprenant,
- les gestes professionnels préconisés,
- l’objectif de la formation : quelles sont les compétences visées ? l’attendu ?
- un parcours pédagogique adapté pouvant comprendre une éventuelle articulation de l’AFEST avec d’autres modalités (à distance ou en présentiel),
- l'identification et l'accompagnements des formateurs (interne, externe ou mixte), en fonction des potentiels et ressources de l’entreprise et de leur engagement.
- la fiaxtion des critères d'évaluation et des outils de formalisation.
* Des phases réflexives.
L’accompagnement par un formateur permet de tirer un plus grand bénéfice de ces moments de prise de recul, de réflexion, bien décrits dans l’article D. 6313-3-2 repris ci-dessus. Il est important de les formaliser afin de pouvoir justifier de leur existence (nécessaire pour la reconnaissance en tant qu’action de formation). Cette formalisation est libre mais il me semble judicieux de voir avec son OPCO les attendus, notamment pour les entreprises de moins de 50 salariés pouvant bénéficier d’une prise en charge de l’OPCO.
La formation en situation de travail est une modalité de formation efficace, présentant de nombreux points forts.
📌Les points forts de l’AFEST
Les points forts de l’AFEST sont :
🔹 De répondre à un besoin en compétences identifié, propre à l’entreprise (activité et conditions de travail) : l’apprenant est confronté aux outils et cas de figures réels de l’entreprise. La gestion des incidents recèle un fort potentiel formatif. Les apprenants sont immédiatement opérationnels en entreprise à l’issue de leur formation, sans décalage entre la formation et la réalité terrain de l’entreprise.
🔹 De faciliter l’organisation logistique de la formation : les salariés n’ont plus besoin de s’absenter pour se former. La formation peut s’organiser plus aisément, pas forcément en continu, en fonction de contraintes de l’entreprise mais en prenant en compte les enjeux pédagogiques.
Pour l’entreprise cela permet aussi la disparition des frais de déplacements et de la gestion des réservations d’hôtel ou de salle.
Pour l’apprenant, cela signifie une absence de perturbation de ses contraintes personnelles.
🔹 De faciliter le respect de l’obligation légale du bilan professionnel : une formation menée en situation de travail peut désormais entrer dans le périmètre des actions de formations entrant dans le bilan professionnel tous les 6 ans (ou selon une périodicité différente validée par un accord d’entreprise, voire de branche)
🔹 Pour les entreprises de moins de 50 salariés, d’accéder aux financements publics et mutualisés, l’AFEST étant désormais reconnue comme action de formation.
🔹 De redonner à l’apprenant une nouvelle appétence pour apprendre : il n’a plus le sentiment « d’aller à l’école » comme dans les formations descendantes en présentiel. Cette modalité de formation renforce la posture d’acteur de l’apprenant au travers des phases productives et réflexives personnalisées, et répond au plus près aux besoins de l’apprenant en situation de travail.
🔹 De développer les compétences des formateurs AFEST. Ils enrichissent leurs compétences en analysant les tâches, en transmettant leur savoir et développent en parallèle leurs capacités pédagogiques.
🔹 D’apporter à ces mêmes formateurs une reconnaissance de la part des collaborateurs de l’entreprise et de modifier leur perception par leur équipe, permettant ainsi de les valoriser tout en favorisant un climat de confiance et de partage.
Mais ce n’est pas toujours facile de mettre en place une action de formation en situation de travail. Il faut faire face à plusieurs contraintes.
📌Les contraintes de l’AFEST
Les principales difficultés de mise en œuvre d’une AFEST sont :
🔹 La difficulté à impliquer des salariés expérimentés, à la fois experts et pédagogues, qui sachent transmettre, écouter, debriefer afin d’accompagner l’apprenant dans de bonnes conditions. Une formation de formateur AFEST peut être nécessaire. Le formateur AFEST n’est pas forcément le manager. Cela me semble plus pertinent de différencier les responsabilités de formateur et d’évaluateur. Le formateur peut être un professionnel aguerri avec lequel l’apprenant sera plus à l’aise dans ses réflexions et aura la possibilité de se tromper, l’évaluateur étant le manager.
🔹 L’entreprise doit prévoir une adaptation de l’organisation de l’activité pendant la période de formation et doit dégager du temps pour les formateurs/tuteurs malgré les impératifs de l’activité et du temps pour concevoir l’ingénierie pédagogique et les étapes du parcours de formation prenant en compte les contraintes de l’entreprise et le positionnement de l’apprenant.
🔹 L’AFEST doit être formalisée. Si le formalisme est libre, la traçabilité se doit d’exister afin de permettre de fournir les éléments de preuve nécessaires au regard des obligations légales.
📌Les financements
Hormis le financement sur fonds propres, une entreprise peut obtenir une prise en charge de l’AFEST dans les cas suivants :
Dans le cadre de son plan de développement des compétences, une entreprise de moins de 50 salariés peut bénéficier d’une prise en charge financière d’une AFEST, pour une formation non obligatoire, sur les fonds mutualisés par l’OPCO et selon les conditions fixées par le conseil d’administration de l’OPCO. L’entreprise de moins de 50 salariés doit donc se rapprocher de son OPCO pour connaître ses possibilités de financement.
Pour toutes les entreprises, la possibilité de conclure l’AFEST par une certification reconnue peut la rendre compatible avec le CPF. Il est alors possible de proposer au salarié d’utiliser son CPF pour cette formation et/ou de l’y inciter par le biais d’abondement.
L’intégration de la FEST dans un contrat de professionnalisation expérimental peut permettre à l’entreprise d’obtenir une prise en charge financière. Et l’objectif visé n’a pas à être une certification mais peut être une compétence définie par l’employeur et son OPCO en accord avec le salarié apprenant.
***
👉L’AFEST est donc une modalité évoluée de la formation terrain, préparée, cadrée et formalisée afin de retenir les avantages d’une formation en situation de travail et les avantages d’un parcours de formation bénéficiant d'une ingénierie pédagogique adaptée. C’est, en quelque sorte, une professionnalisation de la formation terrain.
Comentários